1303
1303 réunit la poésie de Yeghishe Charents,
la musique de Marine Manasian et l'esprit de l'Arménie.

Mon lien avec la culture arménienne

J’étais encore très jeune lorsque ma famille a quitté l'Arménie et pendant de nombreuses années, j'ai vécu loin de ma patrie, qui me manquait énormément. Cela m'a influencé de plusieurs façons, et m’a notamment m’a poussé à faire de la musique, à composer des chansons. Je me suis ainsi créé un nouveau foyer. Puis à un moment donné, j'ai commencé à écrire des chansons en arménien.

En 2019, j'ai sorti mon premier album en arménien AREVI VOSKI, qui est devenu pour moi un retour métaphorique à ma patrie.

Dans cet album, j'ai utilisé à la fois mes propres textes et des poèmes de poètes arméniens - mes bien-aimés Yeghishe
Charents et Paruyr Sevak.

La chanson principale de l’album AREVI VOSKI était « Tamam Ashkharh ». Cette chanson a été écrite par l'ashugh (compositeur et interprète) arménien Sayat-Nova, il y a 300 ans. À cette époque, il vivait à Tbilissi (Géorgie) et écrivait des chansons en trois langues : géorgien, azerbaïdjanais et plus tard, en arménien. Seules les chansons arméniennes nous sont parvenues. Mon amour pour la chanson « Tamam Ashkharh » m'a accompagné pendant de nombreuses années, jusqu'au jour où j'ai décidé d'en créer ma propre version. Je voulais qu'elle sonne moderne et qu’elle soit compréhensible pour chaque être humain sur notre Terre.

En 2019, j’ai décidé de sortir pour faire 20 concerts dans l'une des rues principales de Moscou, Kuznetsky Most. J'ai été agréablement surprise de constater qu’à chaque fois que je chantais « Tamam Ashkharh », une foule d'auditeurs se regroupaient autour de moi. Mon ami a fait une vidéo de ces différentes représentations et nous l'avons publiée sur YouTube. Nous n'avons fait aucune promotion pour cette vidéo, et pourtant elle a rapidement dépassé les 1 million de vues ! Connaissant le pouvoir magique de cette chanson, je suis sûre que le travail avec elle n'est pas terminé et qu'elle doit être popularisée.

Tamam Ashkharh (Live) | Sayat Nova Cover
Plus tard, j'ai sorti une reprise de la chanson de Komitas, intitulée « Qele Qele ».

Komitas était la figure la plus importante de l'histoire de l'Arménie et même de la formation de la musique arménienne au 20ème siècle. Pendant de nombreuses années, il a parcouru l'Arménie occidentale (aujourd'hui territoire de la Turquie) et a recueilli des mélodies et des chants arméniens anciens auprès de gens ordinaires, parvenant ainsi à structurer toute l’histoire de la musique arménienne. Malheureusement, il n'a pas pu se remettre du génocide et a finit ses jours dans un hôpital psychiatrique en France et n'a plus prononcé un seul mot.


Marine Manasian - Qele Qele (Komitas Cover) | Lorik
Je rêve de populariser la culture arménienne, ou plutôt de la faire connaître au plus grand nombre. Il est extrêmement important pour moi que les noms de Komitas, Sayat-Nova,
Yeghishe Charents et d'autres soient connus dans le monde entier, car ils ont apporté une contribution non seulement à la culture arménienne, mais aussi, j'en suis sûre, à la culture du monde entier. Des milliers de personnes dans le monde peuvent s'inspirer de la musique de Sayat-Nova et de Komitas, entrer en contact avec la beauté de la langue arménienne, que Yeghishe Charents a su si brillamment mettre en valeur.

Mon amour pour Yeghishe Charents et le lien que j’ai avec lui est absolument cosmique et inexplicable. Je suis tombé amoureuse de lui en 8ème année et j'ai décidé qu'il était mon poète préféré, sans réaliser que bien des années plus tard, j'écrirais de la musique et chanterais sur ses poèmes, et que je créerais même un album entier avec ses poèmes. Le nom donné à cet album, 1303, a également une signification symbolique, puisque Charents et moi sommes tous les deux nés le 13 mars, avec une différence de 100 ans.
L'idée de l'album 1303 est née en moi depuis assez longtemps. Je n'avais pas écrit une seule chanson à cette époque, mais je savais déjà qu'il existerait, que j'écrirais 13 chansons. J'attendais juste que tout commence à naître.


Le lendemain, nous sommes partis pour l’Arménie occidentale (c'est ainsi que les Arméniens appellent ces territoires), d'où proviennent tous les Arméniens qui vivent aujourd'hui en France, aux États-Unis, etc.
J'ai pu visiter Erzurum, Mush, Van, l'île d'Akhtamar, où se trouve la plus belle église que j'aie jamais vue, Ani (la ville aux mille églises) et Kars. Dans chaque ville, j'ai essayé de chanter dans la rue, mais je n’ai jamais pu car il fallait une autorisation. J'ai quand même réussi à chanter dans les églises. Il était important pour moi que les murs de ces églises entendent à nouveau la langue arménienne.
Kars a été la dernière ville que nous avons visitée. C'était la ville que j’attendais avec impatience, car c'est à Kars que mon poète préféré, Yeghishe Charents, est né en 1897. Sans doute grâce à la connexion cosmique qui me lie à Charents, par miracle, j'ai pu chanter dans la rue de Kars, le soir. Et c'était absolument incroyable et hors du commun.

Avant la représentation, j'ai dit à mon ami : « j'espère qu'ils ne me tueront pas. » J'ai chanté des chansons en arménien dans les rues de cette ville, où pendant cent ans, il était interdit de parler arménien et où il valait mieux taire ses racines arméniennes. Les gens qui m'entouraient ne comprenaient pas qui j'étais, ni dans quelle langue je chantais. À un moment donné, je leur ai demandé en turc - grâce à Google Traduction - s'ils comprenaient de quelle langue il s'agissait et d'où je venais. Ils ont répondu : « Non. » Je leur ai alors dit que je venais d'Arménie. Ils ont applaudi et m'ont dit : « Bienvenue ! »

C'était probablement la plus grande victoire de ma vie : arrêter de haïr. Je suis convaincue que c'est Charents qui m'a aidé à réaliser mon rêve de chanter à Kars.
C'est pourquoi l'album 1303 est si important pour moi. Aujourd’hui, je veux pouvoir le partager avec le monde entier.
Agnès Portal
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